dimanche 2 avril 2017

Les Faux-monnayeurs au Lavandou




Les 4e Journées Catherine Gide organisées les 13 et 14 mai prochains au Lavandou exploreront Les Faux-monnayeurs, en conviant tout particulièrement les lycéens qui se penchent cette année sur ce livre inscrit au programme du baccalauréat au côté du Journal des Faux-monnayeurs. Plusieurs interventions de spécialistes d'André Gide promettent de se mettre à leur niveau pour les aider dans la compréhension de ce foisonnement narratif, seul "roman" au sens où Gide entendait cette composition en faisceaux.

Samedi 13 mai
 
9h00 Accueil des participants aux conférences-débats et présentation du programme (interventions
limitées à 20' pour laisser place aux questions et réflexions du public et des lycéens)
9h30 Pierre Masson : Gide avant le Journal des Faux-monnayeurs : données biographiques et problèmes induits
10h00 Christine Ligier : La marche vers le roman : à partir des Cahiers d’André Walter, pratique et réflexion de la forme narrative avec le roman comme horizon
11h00 David Walker : Dimension morale et roman d'apprentissage
11h30 Pierre Masson : Les Faux-monnayeurs, roman symbolique
14h00 Interventions d’élèves de Terminales Littéraires
14h30 David Walker : Les Faux-monnayeurs comme critique du roman
15h00 Christine Ligier : Le Journal des Faux-monnayeurs, construction d'une pratique romanesque
15h30 Suzanne Joncheray : L'image des Faux-monnayeurs dans les manuels scolaires
16h00 Débat - bilan de cette première journée
16h30 Projection du film d’Ambre Fuentes, Après le livre. Une enquête sur André Gide - 1h27

Dimanche 14 mai
 
9h00 Klaus Weber : Trois temps de lecture des Faux-monnayeurs, 1964, 1989 et 2016
9h30 Maryvonne de Saint Pulgent : Les Treilles, Gide et la musique
10h00 Jean-Pierre Prévost : Présentation du jeu de société, le "Jeu des Faux-monnayeurs"
10h30 Visite de la "Villa Théo" à Saint-Clair, ancienne maison du peintre Van Rysselberghe et futur centre d’art du Lavandou en phase d’achèvement.



Réhabiliter Maria Van Rysselberghe


Jacques Roussillat, Maria Van Rysselberghe, la petite Dame d'André Gide, 
Editions Pierre-Guillaume de Roux, Paris, 2017
270 p., 24,50€, ISBN 978-2-36371-180-9


Après l'édition de la Correspondance André Gide-Maria Van Rysselberghe l'an dernier (Cahiers de la NRF, Gallimard), voici un petit livre qui contribuera très probablement à rendre à "la Petite Dame" la part de lumière qu'elle mérite. C'est d'ailleurs l'objectif avoué de son auteur, Jacques Roussillat, membre fidèle de l'Association des Amis d'André Gide : réhabiliter l'écrivain et la figure de la vie littéraire parisienne.

La vie de Maria Van Rysselberghe a un "avant" et un "après" Gide. Avant, on ne sait d'elle et de sa mystérieuse famille belge quasiment rien. Par exemple, sur sa mère : comment la veuve d'un cadre des chemins de fer devient-elle patronne d'une des plus grandes maisons d'édition belges, qui réalise tout à la fois l'annuaire royal et les revues de l'avant-garde artistique ? Ou sur son prénom : quel événement intime lui fait renoncer à Marie pour devenir Maria ?

Monnom. Mon nom. La question du nom sera importante chez Maria. Comme sa mère, la Veuve Monnom, déjà désignée en référence à un homme, c'est en tant que "Petite Dame" d'André Gide qu'elle sera connue. Et cela va durer, se répéter. Ainsi plusieurs pseudonymes l'accompagnent : M. Saint-Clair, pour ses articles dans la NRF, Philomène, son deuxième prénom, dans ses échanges avec Schlumberger, Petite Dame avec Gide et ses proches, Mamie Tit en famille...

Sur cette jeunesse et ces débuts en Belgique, Jacques Roussillat n'apporte pas d'éclaircissements, mais il réussit à décrire le bouillonnement artistique de l'époque. "L'atmosphère de serre chaude", pour reprendre une expression gidienne, dans laquelle Maria éclot à la peinture, à la littérature, aux combats sociaux et à l'amour. Le mariage avec le peintre Théo Van Rysselberghe et la passion avec Emile Verhaeren "préparent" à leur façon la rencontre avec Gide.

A partir de 1918, le risque était grand de voir le livre devenir une paraphrase des Notes pour l'histoire authentique d'André Gide. Jacques Roussillat évite cet écueil en se concentrant sur quelques clés temporelles de compréhension du personnage réel de Maria Van Rysselberghe, longtemps réduite au "petit Eckermann". A commencer par les éditions Gallimard qui escamotent totalement des couvertures des Cahiers de la Petite Dame le nom de leur auteur...

"Confidences à Autheuil", "Années de guerre" ou "Le Vaneau" forment des chapitres courts qui maintiennent l'intérêt du lecteur dans ces réseaux complexes, tant littéraires qu'intimes et familiaux, réseaux complexes que Gide affectionnait, et qu'il a pu entretenir, d'ailleurs, grâce à l'aide matérielle, organisationnelle, osons ce mot barbare, de la Petite Dame. Et si, sur le plan familial, Gide a pu donner libre court à sa volonté d'inventer une nouvelle forme de famille, c'est aussi grâce à la complicité de Maria.

Mais ne tombons pas une nouvelle fois dans la réduction à la part gidienne de la Petite Dame. En contribuant à faire mieux connaître cette personnalité forte, libre, passionnée, le livre de Jacques Roussillat fera aussi très probablement découvrir l'écrivain. Il faut en effet (re)lire Il y a quarante ans pour en apprécier l'atmosphère compressée, ou les portraits vifs de la Galerie Privée, ou bien sûr les Cahiers de la Petite Dame pour, derrière la chronique gidienne, mesurer tout l'art du chroniqueur qui sait écouter, voir et peindre avec ses mots.