vendredi 30 décembre 2016

Souvenirs d'Adrienne Monnier


« Rencontré Paul Valéry chez Adrienne Monnier. » (Journal, 30 décembre 1922). Gide, comme à peu près tous les écrivains de son temps, était un habitué de la Maison des amis des livres, librairie et bibliothèque de prêt ouverte le 15 novembre 1915 par Adrienne Monnier. Paul Fort, Pascal Pia, Jules Romains, Léon-Paul Fargue, Louis Aragon et André Breton comptent parmi les premiers abonnés, bientôt rejoints par André Gide, Paul Valéry, Valéry Larbaud, André Salmon, Max Jacob, Pierre Reverdy, Blaise Cendrars, Jean Paulhan, Tristan Tzara, Jean Cassou... Fin 1920, la librairie a 580 abonnés et en 1926 elle compte 18 400 volumes.

Comme on le lira plus bas dans une transcription d'extraits des entretiens données par Adrienne Monnier à la Chaîne Parisienne en 1947, c'est en 1917 que Gide franchit pour la première fois le seuil de « la Maison ». Mais dès 1916, Adrienne Monnier avait écrit à Gide pour lui demander un exemplaire des Nourritures terrestres pour sa bibliothèque de prêt. Gide participera assez rapidement aux « séances », des soirées de conférences, lectures, mais aussi parfois concerts, donnés dans la librairie.

Des soirées pas toujours à son goût, car si Adrienne Monnier loue son talent de lecteur, Gide semble avoir plus de mal avec certaines lectures, comme le révèle les passages des Cahiers de la Petite Dame :

« Nous allons chez Mlle Monnier, à une conférence que Valéry [sic] Larbaud donne sur Samuel Butler. […] La conférence de Larbaud est charmante et ingénieuse (comparaison avec Épicure), mais elle est suivie d'une interminable et languissante lecture. Gide, impatienté, me fait des signes désespérés et nous sortons avant la fin. »

Une soirée consacrée à Jean Schlumberger, en mai 1931, sera plus réussie... Mais la Petite Dame ne semble pas porter la libraire dans on cœur : « Les discours d'Adrienne Monnier sur la sincérité, qu'un instant après sa conduite dément devant nous, sont d'une belle impudeur. », note-t-elle sans concession le 8 novembre 1932. On sait enfin que Gide faisait partie des soutiens de la première heure lors de la souscription à l'édition de la traduction de l'Ulysse de Joyce, lancée par Sylvia Beach et Adrienne Monnier.


 Adrienne Monnier devant sa librairie de la rue de l'Odéon


L'incroyable foyer littéraire de la rue de l'Odéon revivait il y a quelques jours grâce à la rediffusion des entretiens d'Adrienne Monnier sur France Culture. Consignons ici les passages concernant Gide :

— Vous nous avez raconté, Mademoiselle, comment vous aviez connu Léon-Paul Fargues, Breton, Apollinaire... Nous en étions restés je crois en 1916. Est-ce à cette époque que vous avez connu Gide ?

— J'ai dû le connaître un peu plus tard, au début de 1917. Je lui avais écrit en 16 déjà. Je lui avais écrit en 16 parce que la bibliothèque de prêt que j'avais fondée, qui fonctionnait déjà assez bien, ne possédait pas les Nourritures terrestres. Ce qui me semblait une lacune terrible. Alors je lui avais écrit pour lui demander s'il voulait bien en donner un exemplaire à ma bibliothèque, que ce n'était pas pour moi mais pour les jeunes qui venaient à la Maison. Il m'avait répondu qu'il était fort surpris d'apprendre que c'était épuisé, il n'en revenait pas, d'ailleurs il n'était pas à Paris à ce moment-là, il était à Cuverville. Et j'ai dû le voir au début de 17, un peu avant Valéry qui est venu au printemps 17, fin avril je crois, un peu avant la parution de la Jeune Parque. Et nous avons tout de suite... Enfin Gide également a joué un très, très grand rôle à la Maison, mais un rôle peu familier au début, naturellement. C'était un maître, un maître très respecté, qui a d'ailleurs toujours été pour nous d'une gentillesse étonnante et qui nous a aidé à faire des séances, qui a fait des lectures. Il lit d'une façon merveilleuse comme vous le savez. Il a lu des poèmes de Valéry à la Maison, de Fargues, enfin nous parlerons de ces séances tout à l'heure un peu plus longuement.

[…]

— Parlez-moi un peu de ces fameuses séances, Mademoiselle.

Eh bien je vous ai déjà touché deux mots de la grande séance Claudel organisée au Gymnase, mais les séances que j'aimais beaucoup et que les gens aimaient beaucoup, c'était celles qui avaient lieu à la librairie. Naturellement on étouffait car on était empilé dans cette petite librairie que vous connaissez bien, on était facilement 150. Enfin il y a eu des choses historiques, on peut le dire. Par exemple Romains nous a lu en 17, ça a été la première séance, son poème Europe.

Il y a eu en 18 une séance Fargues avec Ricardo Viñes le grand pianiste qui jouait des morceaux de musique choisis par lui qui étaient ravissants, du Debussy, du Ravel et puis Jean Lionel qui lisait des poèmes, et Fargues et moi aussi d'ailleurs.

Maintenant, qu'est-ce que nous avons eu d'important ? Il y a eu le Socrate de Satie [ndr : le 21 mars 1919] avec Suzanne Balguerie et l'auteur, et Cocteau qui avait fait une présentation. A cette séance, comme chacun sait, étaient présents Claudel, Gide et Jammes.

La première séance Paul Valéry a eu lieu en avril 19. Et là Gide lisait, c'est là qu'il a lu La Pythie de cette façon absolument épatante, il l'avait d'ailleurs dactylographiée, elle n'avait pas paru. Fargues lisait aussi, André Breton, moi-même. Et Fargues avait fait au début un petite causerie très intéressante où il rappelait l'élite à ses devoirs.

Il y a eu une deuxième séance Fargues en mai, qui était également tout à fait mémorable puisque Réjane, la grande Réjane est venue lire les vers de Fargues. C'est là qu'elle a lu Aeternae Memoriae Patris , ce magnifique poème, qu'elle a lu d'une façon tellement simple, tellement émouvante et certainement moins actrice que nous amateurs. La encore Gide a lu, Francis de Miomandre, d'une façon charmante, Jacques Porel.

(Extraits des Entretiens avec Adrienne Monnier, premières diffusions les 28, 30 mai, 4 et 6 juin 1947 sur la Chaîne Parisienne, rediffusés le 17 décembre 2016 sur France Culture)

mercredi 28 décembre 2016

Madeleine révèle une source enfantine de Paludes


Le Journal de Madeleine Rondeaux, récente publication de l'Association des Amis d'André Gide, complète les extraits donnés par Jean Schlumberger dans Madeleine et André Gide (Gallimard, 1956). Si l'on y voit en effet la lutte de Madeleine pour se détacher, selon les vœux de la famille, du projet de mariage avec son cousin, on voit aussi combien lui manque alors l'influence intellectuelle qu'André exerce lorsqu'il est près d'elle.


Leurs lectures partagées, leur réciproque émulation manquent à tous deux. Dans son introduction, Pierre Masson montre bien l'erreur de Jean Schlumberger qui avait écrit dans le chapitre de son livre consacré au Journal de Madeleine : « Parmi les papiers de Gide se trouvaient, rue Vaneau, deux petits carnets dont aucun de ses amis ne savait l'existence et dont lui-même semble n'avoir pas compris l'importance exceptionnelle. »


Gide s'est au contraire inspiré de plusieurs de ces pages, comme il le faisait des lettres de Madeleine pour dessiner les traits de certains de ses personnages féminins, allant même, comme le montre encore Pierre Masson, jusqu'à recopier dans La Porte étroite des passages du Journal de Madeleine. Parmi tous les rapprochements signalés par Pierre Masson, même celui qu'il qualifie d'hasardeux ne l'est nullement : lors d'une de ses promenades près d'Arcachon, Madeleine découvre une file de chenilles processionnaires :

« Vie douce, unie. On finit par prêter beaucoup à ces pins, ces dunes, ces teintes de vielles tapisseries, et par s'y attacher d'autant.

Incidents :
L'apparition des chenilles processionnaires. La Gileppe. Phil et Lami, les deux coléoptères, ne rencontrent-ils pas une colonie de processionnaires déménageant devant l'inondation montante. Je me souviens de l'effet qu'avait produit sur mon imagination d'enfant la description de ces longues files de semi-petites nonnes toutes blanches, au clair de lune. »

A rapprocher de la fin du chapitre « Angèle ou le petit voyage », dans Paludes :

« Du haut des pins, lentement descendues, une à une, en file brune, l'on voyait les chenilles processionnaires — qu'au bas des pins, longuement attendues, boulottaient les gros calosomes.
« Je n'ai pas vu les calosomes! dit Angèle (car je lui montrai cette phrase).
— Moi non plus, chère Angèle, — ni les chenilles. — Du reste, ça n'est pas la saison; mais cette phrase, n'est-il pas vrai — rend excellemment l'impression de notre voyage... »

Outre le ton de Paludes, qui moque Angèle-Madeleine, on découvre ici une lecture enfantine de Madeleine et que Gide a très certainement partagée : La Gileppe, roman de l'entomologiste belge Ernest Candèze, sous-titré Les infortunes d'une population d'insectes (Bibliothèque d'éducation et de récréation, Hetzel, Paris, 1879)*.


Ce roman entomologique raconte les conséquences pour la petite faune de la création, à partir de 1875, du barrage de La Gileppe. On y suit les aventures d'un hydrophile, nommé Phile, et d'un lamie, nommé Lamie, qui croisent un certain Calosôme (sic) qui leur explique que la chenille processionnaire est son mets préféré.
« — C'est ainsi, dit le calosôme. En naissant, je me suis trouvé, avec mes frères et mes sœurs, au milieu d'un nid de processionnaires. Notre mère y avait pondu ses œufs afin que nous n'eussions nulles recherches pénibles à faire pour nous procurer ces chenilles, qui constituent notre nourriture exclusive. Quant à ce jeune coucou qui vient de naître, si j'osais, j'irais l'étrangler.
— Pourquoi? demanda le grillon.
— Mais pour ses crimes d'abord ; et puis aussi, s'il faut tout dire, parce qu'il va me faire concurrence, et une rude concurrence. Les coucous sont, comme les calosômes, grands amateurs de chenilles processionnaires; mais ils en détruisent bien plus que nous. Ce n'est pas sans raison que sa mère l'a établi sur cet arbre. Vous allez voir que dès demain la fauvette lui en apportera. »

Cette lecture enfantine ne manqua pas d'encourager la fibre naturaliste chez Gide. On sait d'ailleurs qu'elle influença toute une génération puisque Ernst Jünger mentionne lui aussi La Gileppe parmi les livres qui développèrent chez lui le goût de l'entomologie. Et Francis Jammes lui-même ne se mit-il pas à écrire un essai sur les fourmis à la suite de sa lecture ? Mais plus que la source, n'est-ce pas son évocation, déjà dans le style paludéen, du Journal de Madeleine qui aura directement influencé Gide pour l'écriture de Paludes ?


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* Voir le livre en ligne sur Gallica

lundi 26 décembre 2016

Gide au bac : conseils aux lycéens


 « Comment dégoûtez des milliers 
de jeunes gens d'un auteur ? 
Foutez-le au bachot ! »

André Gide a eu le grand malheur d'être livré cette année en pâture au pédagogisme et à l'inculture de la salle des profs. Le cri de détresse qui s'élève des pupitres du fond porte un autre nom : le phénomène gidobaque.

Alors, chers lycéens, courage ! Dans quelques années vous découvrirez que les Faux-monnayeurs, « C'est un peu rasoir. Mais il y a des choses très bien. »

En attendant, quelques ressources pour régurgiter ce qu'on attend de vous :

- des résumés et analyses en vidéo, chapitre par chapitre : https://www.mediaclasse.fr/lectures/110

Rassurez-vous, la plupart de vos professeurs de français n'avaient pas lu une ligne de Gide avant cette année. N'hésitez pas à aller fouiller dans les documents que d'autres professeurs ont réalisés pour eux afin de fournir la matière prémachée aux cours qu'ils vous donnent :

- http://www.lettresvolees.fr/gide/index.html

- https://www.ac-strasbourg.fr/pedagogie/lettres/francais-lycee/ressources-en-terminale/

Ce document d'une trentaine de pages sera une mine. C'est écrit dans le style pédagogique le plus aride et à la fois le moins français possible : évitez les copier-coller mais inspirez-vous des axes retenus et des éléments qui viennent les étayer.


Le nom de Guillaume Gaulène

« Que vaut Le Mémorial secret de Guillaume Gaulène, très prisé de Robert Poulet ? », demande Morand à Chardonne dans une lettre du 12 février 1960. Deux ans plus tard, alors que Gaulène vient de publier Le vent d'autan, et L'assaut, Morand insiste : « Avez vous-lu ce Gaulène, dont je lis le nom partout ? »

Guillaume Gaulène est de ces romanciers dont le nom surnage, et une œuvre surtout, Le Mémorial secret, qui annonce Voyage au bout de la nuit. Un livre connu aujourd'hui surtout des milieux anarchistes, et dont on se passe le titre au dessus des boites des bouquinistes. C'est l'expérience que vient de vivre Pascal Zamor, qui l'a partagée avec nous sur Facebook et à présent sur son blog.

Lors de ses recherches, notre ami est tombé sur une page des Nouvelles littéraires du 14 juin 1924 dans laquelle on peut lire ce qui est probablement la seule interviou du discret Gaulène. Et dans laquelle ce dernier mentionne Gide, au grand dam de son interviouveur, thuriféraire de Massis... Un grand merci à Pascal Zamor.

Un écrivain languedocien
Guillaume Gaulène

(extrait*)

« Je dois beaucoup à Duhamel. Parmi les écrivains d'aujourd'hui, Duhamel est un de ceux que je préfère.
– Et quels sont les autres ?
– André Gide, dont j'aime l'inquiétude.
– Une inquiétude où il se complaît et qui ne laisse pas d'être malsaine. Rappelez-vous ce qu'en dit Massis.
– Pour moi, c'est justement par ce qu'il y a d'inquiet, voire de malsain en lui qu'il rejoint les écrivains catholiques.
– A qui pensez-vous ?
– A Mauriac. Il est malsain, j'aime ce qu'il y a en lui de voluptueux et de tourmenté. Dans Génitrix, d'ailleurs, il atteint pleinement à la maîtrise.
« J'aime la foi pour son âpreté dans les passions, la belle sensualité, le bouleversement que le catholicisme met dans l'âme des hommes.
– Voilà une conception de la religion qui risque de devenir démoniaque. Et certes, je n'ignore pas que le catholicisme donne à la vie un sens tragique et qu'il crée des luttes poignantes. Mais il ne s'en contente pas : il lui faut la victoire et la paix ; il est faiseur d'ordre, non de désordre. Saint Augustin a dit que notre cœur est inquiet jusqu'à ce qu'il se repose en Dieu. Encore une fois, rappelez-vous tout ce que dit Massis en la deuxième série de ses jugements.
– Et moi aussi, j'aime beaucoup Massis ! Mais c'est que je le trouve également inquiet. J'aime la violence de son objurgation pathétique à Rivière. Suis-je loin de Pascal, qui n'approuvait, que ceux qui cherchent en gémissant ?
– Il faudrait, pour causer de tout cela, une conversation que vous ne m'accordez pas. Dites-moi vite quels sont encore vos auteurs préférés.
– Cherchez toujours dans le même sens. Il y a Baumann**, dont L'Immolé est le chef-d'œuvre. Force, tragique, souffle épique. Il y a Estaunié, pudeur, sourire sur de la tristesse, force apaisante, mélancolie, œuvres qui font en nous de la solitude et du silence. Il y a Bachelin***, si grave, en pleine possession de son métier, le Péché de la Vierge est un roman solidement construit et qui ne peut nous laisser indifférents. Il y a Ramuz, poète dans le roman, et Montherlant qui nous donnera une œuvre si le succès ne l'a pas gâté, et Escholier**** qui est un maître dont j'aime le sourire trempé de larmes. Il y a... »

Mais le train emportait Gaulène et je n'entendis plus d'autres noms. Du reste, je ne suis pas bien sûr qu'il ne se soit pas encore trompé de direction, et qu'au lieu de filer à Toulouse, il n'ait obliqué à Narbonne vers l'Espagne ! »

Jean SOULAIROL.


Complétons ce billet sur Gaulène en citant la critique du Mémorial secret par Marcel Arland, critique qui referme la NRF numéro 155 du 1er août 1926, ouverte avec... la première partie du Journal des Faux-monnayeurs de Gide !

LE MÉMORIAL SECRET, par Guillaume Gaulène (Rieder).

Parmi les œuvres de jeunes écrivains parues en ces derniers mois, voici une de celles qui m'ont le plus vivement touché. Pour l'aimer, j'ai dû négliger plus d'une protestation qui s'élevait en moi contre une forme souvent pénible, contre des procédés souvent faciles, contre telle attitude, que j'eusse peut-être souhaitée plus pure. Mais il y a dans cette œuvre une telle vigueur, un tel élan passionné et sincère, qu'à la fin, ce ne furent plus que ces qualités dont je voulus garder le souvenir.

L'histoire est simple; c'est celle d'un homme, en déroute lui-même, qui s'acharne presque inconsciemment contre une femme et n'a de cesse qu'il ne l'ait avilie et fait déchoir à jamais. La scène est une ville de l'Est, après la guerre ; l'air est pesant ; tout est sombre, parfois un peu mélodramatique, parfois tragique ; les personnages ont des gestes gauches, ils ne cherchent même plus une raison de vivre ; à peine trouvent-ils encore la force de s'étonner de leurs gestes ou de se plaindre.
Une sorte de démon triste semble, derrière la scène, tirer les ficelles de ce monde misérable, — à moins que ce ne soit une Providence aux voies fort détournées : si je me risque à ces images, c'est que M. Gaulène choisira sans doute entre elles quelque jour.

Le conflit posé, ce qui m'intéresse le plus en ce roman, c'est la manière dont il se précise et dont il croit en violence. Nous assistons à une progression incessante dans les sentiments des personnages et dans le drame qu'ils amènent. Le plus haut degré qu'atteint ce progrès, c'est à la dernière page qu'il l'atteint ; nous fermons le livre, et le conflit persiste encore : c'est que de semblables histoires ne peuvent pas avoir de dénouement ; si parfois elles en proposent un, il n'y faut voir qu'une concession au lecteur, ou que de la fatigue.

Le précédent roman de M. Gaulène : Du Sang sur la Croix manifestait des qualités fort rares d'évocation et de peinture. Or il me semble que ces qualités, très apparentes aussi dans le Mémorial Secret, s'exercent un peu au détriment de la vie intérieure des personnages. Je suis tenté de regretter que cette vie intérieure ne soit pas plus profonde, et que la psychologie des personnages ne soit pas parfois un peu moins rudimentaire. Je crains que l'auteur ne se soit ménagé une partie trop belle. Et sans doute la plupart de ces personnages, il les a choisis d'humble condition ; sans doute aussi les princesses de Racine prêtent-elles à de plus fines analyses que les ouvrières de Zola. Mais je crois qu'il est faux de diminuer d'autant plus la vie intérieure des personnages qu'on les choisit de plus modeste extraction. C'est aller à la fois contre la vérité particulière de ces personnages, et contre leur signification générale. Car je vois assez bien comment une ouvrière de Zola pourrait se reconnaître dans une princesse de Racine ; mais l'inverse, je ne le vois nullement, et je regrette de ne pas le voir. Je ne forcerais qu'à peine ma pensée, en disant que Zola peint ses ouvrières en grand seigneur, tandis que Racine peint ses princesses en homme. Ce doit être la qualité d'un romancier que d'être humble avec les humbles et grand avec les grands.

MARCEL ARLAND

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** Emile Baumann (1868-1941), professeur au lycée de La Roche-sur-Yon, auteur de livres imprégnés de liturgie catholique, remarqué par Bloy dont il sera proche.
*** Henri Bachelin (1879-1941), romancier et spécialiste de musique, religieuse surtout, auteur de romans de formation et de tableaux de la vie provinciale, inspirés de sa vie à Nevers. Lors de ses passages à Paris, il fréquentait Charles-Louis Philippe, Jules Romain et André Gide.
**** Raymond Escholier (1882-1971), journaliste, romancier, critique et grand passeur d'art (il fut conservateur de la Maison de Victor Hugo et directeur du Petit Palais). Il co-dirigea la revue Demain. On lui doit des poèmes mais aussi des romans régionalistes écrits avec sa première femme, Marie-Louise Ponse-Tande.

samedi 17 décembre 2016

Les tombes Gide à Uzès définitivement détruites : honte à la ville et aux descendants des Gide !

[actualisé le 7 janvier 2017 : voir à la fin du billet]

En 2010, les Amis d'André Gide, des Uzétiens soucieux de leur histoire et de leur patrimoine, et le blog e-gide lançaient une alerte pour sauver les tombes de la famille Gide à Uzès, tombes laissées à l'abandon par les descendants des Gide et par la ville d'Uzès (voir cet ancien billet).

Le maire, Jean-Luc Chapon, avait alors répondu ceci :

« Monsieur,

j'ai bien reçu votre lettre du 20 novembre 2010, dans laquelle vous attirez mon attention sur la nécessité de conserver le souvenir de la présence de la famille Gide à Uzès, en préservant les tombes de la famille Gide au cimetière protestant.
La municipalité d'Uzès, au travers d'expositions, de conférences et d'achats au profit de la médiathèque et du musée Georges Borias, a le souci de mettre en valeur et de faire connaître les œuvres et la personnalité de Charles et d'André Gide.
Je ne peux donc que partager votre sentiment et je vous remercie de votre proposition de participer avec l'Association des Amis d'André Gide et la Fondation Catherine Gide à la préservation de ces tombes. Je ne manquerai pas de vous contacter lorsque le projet de restructuration du cimetière sera mis en œuvre. »

Alors que nous avions encouragé nos lecteurs à adresser des messages à la ville d'Uzès, l'un d'entre eux avait eu la chance de recevoir cette réponse :

« Monsieur,
je tiens à vous rassurer sur le fait que les tombes de la famille GIDE seront préservées par les services techniques de la Mairie. »

De notre côté, nous alertions le ministre de la culture de l'époque, Frédéric Mitterrand, qui sollicita les services de la DRAC. Le responsable des Monuments Historiques alertait lui aussi la municipalité d'Uzès.

Force est de constater, six ans plus tard, que ni la préservation par les services techniques de la ville, ni l'entretien par les descendants n'ont été assurés, comme le montrent ces photos du mois dernier :






Comme on le voit sur cette seconde image, depuis 2010, les arbres près des tombes sont tombés sur les dalles, dalles désormais fracturées alors qu'elles étaient encore intactes en 2010 (voir photos plus bas). Pire encore s'il est possible : des déchets s'entassent tout autour... Cette partie du cimetière ressemble aux rues de la ville lorsqu'y déferlent les hordes de touristes, à qui l'on ne propose que camelote, souvenirs gardois made in China et musée du bonbon industriel...

La ville d'Uzès a clairement fait le choix de renier ses patrimoines, et ses promesses, dont celle de l'adjoint au patrimoine en 2011 dans VMF  :



 Les descendants de la famille Gide n'ont pas été davantage à la hauteur de leurs ancêtres.

Que faire ? Que reste-t-il à préserver ? Plus grand chose... hélas !

Saluons le courage d'un habitant d'Uzès, M. Blanc qui a publié dans la presse locale l'article suivant :



En guise de réponse, une fois de plus : un article dilatoire d'une page sur les procédures de reprise, qui laisse bien comprendre qu'il faut faire place nette pour plus de rentabilité, et les mêmes promesses déjà bafouées (les journalistes sont-ils même allés voir l'état des tombes ?).

Ajout du 7 janvier 2017 :

La nouvelle mobilisation autour de ces pauvres tombes aura peut-être porté ses fruits : des informations provenant d'Uzès indiquent qu'un des descendants de Charles Gide s'est manifesté pour réaliser les réparations qui doivent être effectuées. L'Association des Amis du Musée d'Uzès devrait lui apporter son soutien financier. Bravo et merci à eux !

Madeleine intrigue encore



Madeleine intrigue encore. Ainsi après avoir fait l'objet d'une pièce de théâtre aux Etats-Unis, Madeleine Remains: In Memory, A Wife of Genius, de Michael Martin, monologue récemment repris par Karen Ball, ou encore d'une estampe de David Maes à voir jusqu'à fin décembre au musée d'Uzès, Madeleine fait l'objet actuellement d'une exposition photographique à Paris : La Madeleine de Gide.


http://librairie.artcurial.com/events.php?blid=6286#359848


"La librairie d’art d’Artcurial présente La Madeleine de Gide, nouvelle exposition de la photographe Pupa Neumann du 15 décembre au 10 janvier 2017 : une série inédite consacrée à une femme peu connue du grand public, Madeleine Gide, cousine et épouse de l’écrivain André Gide.

Qui est cette femme avec qui Gide a passé plus de 40 ans de sa vie, sans même avoir posé une main sur elle ? Quelle sorte de femme accepterait cette situation sans bouleversement ? Était-elle une femme soumise ? Une tordue ? Une idiote ?… ou simplement une femme libre ? De là s’est révélée la série La Madeleine de Gide et le fantasme que Pupa Neumann projetait sur cette femme. Une femme entre un mur et une table, qui attend…

La Madeleine de Gide, nouveau travail de Pupa Neumann est né d’une participation au concours “PHOTO-ROMAN” d’Havas Paris pour Les Rencontres de la photographie d’Arles dont le principe était de mettre en images des mots.

Pupa Neumann a ainsi imagé trois lignes extraites de Si le grain ne meurt d’André Gide : “Ma cousine était très belle et elle le savait. Ses cheveux noirs qu’elle portait en bandeaux faisaient valoir un profil de camée (j’ai revu sa photographie) et une peau éblouissante.

Au lieu d’illustrer simplement le texte, Pupa Neumann a cherché à en savoir davantage sur Madeleine.

Texte de Nathalie Fiszman, extrait de la préface du catalogue de l’exposition

Le personnage de Madeleine Gide avait tout pour séduire Pupa Neumann. J’écris « le personnage », car la vraie Madeleine Gide n’est présente, ici, que par ce qu’elle représente : la pureté poussée à son extrême, associée à de la tristesse ou peut-être un sens aigu du sacrifice.
La vraie Madeleine était la cousine d’André Gide et n’a jamais consommé son mariage avec lui. Il l’aimait d’un amour bien trop pur pour la toucher, réservant cela aux garçons. Si lui dissociait l’amour en pur et impur, qu’en était-il de cette femme qui est restée mariée avec lui, l’a accompagné, l’a protégé, l’a aimé ? Détruisant ainsi sa beauté pour se consacrer aux autres et aux tâches domestiques ? Renonçant à la vie en quelque sorte.
La Madeleine de Pupa Neumann, est toujours très belle. Elle incarne, par son teint pur et ses poses la fragilité et la grâce. Elle est tantôt sexuée, tantôt pas, illustrant ainsi son combat intérieur. On découvre une jeune femme résignée, au teint d’opale, les cheveux lisses, sur d’autres clichés, une effrontée, très sexuelle, en pâmoison, ou tenant un médaillon – religieux ? – entre les dents. Ses bras sont des cygnes, ses cheveux, un indice de son état. Parfois elle crache. Et parfois, elle redevient une petite fille qui joue avec de drôles de hochets. Elle joue, mais elle est figée. Madeleine est une poupée mécanique qui assume son destin. Ses cheveux ne sont plus naturels, et la photographe lui a ajouté des rubans qui ont perdu la légèreté des rubans qui volent au vent quand les petites filles courent. Ceux-là sont lourds, immobiles, et révèlent le poids et l’absence de mouvement.
Finalement, les photos où Madeleine est la plus vivante sont les plus inquiétantes aussi. Pupa Neumann donne à voir une Madeleine sexuelle, peut-être en secret dans ses fantasmes. Une Madeleine en soutien gorge avec un serre tête de petite princesse, qui est aussi une petite fille qui découvre un jouet lapin.
La force de cette série de photos, c’est de nous interroger sur les femmes en général, qui sont bien entendu libres d’être des maîtresses, des femmes qui aiment le sexe ou qui en rêvent, ou des femmes dégoutées, amusées, étonnées et même très sages. Des femmes- enfants, des petites filles très éveillées ou perverses, de drôles de poupées. La Madeleine de Pupa Neumann nous donne certainement un goût de nos propres démons ou en tout cas nous oblige à nous demander quelles sont les femmes qui sommeillent en nous."

Pupa Neumann : http://www.pupaneumann.com/
Artcurial, librairie d’art : 61, Avenue Montaigne – 75008 Paris
Accès : Métro Franklin-Roosevelt Bus : 28, 42, 80, 73, 93
Heures d’ouverture : Du lundi au vendredi de 9h00 à 19h00. Le samedi de 10h30 à 19h La librairie sera ouverte les dimanche 4, 11 et 18 décembre de 10h30 à 19h
Exposition du 15 décembre 2016 au 10 janvier 2017


vendredi 2 décembre 2016

Obsession célinienne

A la vente de Livres & Manuscrits du 14 décembre chez Cornette de Saint Cyr à Paris, on verra passer au lot 77 deux lettres de Louis-Ferdinand Céline. Dans la seconde, datant de 1954 et faisant allusion à la remise du prix Nobel à Hemingway, Céline revient sur son obsession :
"Moi, regarde si j'avais conseillé à tous les jeunes gens de se faire enc… j'aurais remporté le Nobel, comme Gide ! le parlement aurait voté un budget spécial pour acheter ma maison ! la convertir en musée !"

vendredi 11 novembre 2016

Du côté des ventes aux enchères


La vente aux enchères Tableaux Suisses et Internationaux et Vins le 26 novembre par Galartis SA à Lausanne présente, au lot 309, une petite huile sur carton de Maurice Denis, réalisée lors de son séjour en 1904 à Cuverville, chez les Gide.



Lot 309
DENIS Maurice, 1870-1943 [FR].

Reflet de soleil couchant dans la mare, c. 1900,
huile sur carton (23 x 38.5 cm).
Monogrammé b. d.
Le croquis de ce tableau a été fait lors du séjour du peintre à Cuverville, en 1904, chez son ami André Gide. Ce dessin a donc permis de préciser la date d'exécution de l'huile et a permis de situer géographiquement le tableau
Estimation : 30 000 CHF / 40 000 CHF

 *

Le 2 décembre à Prague, lors d'une vente d'Art Moderne chez Kunsthaus Lempertz, le petit buste en terre cuite de Renée Sentenis représentant Gide refait surface. C'est le jeune écrivain allemand Joseph Breitbach, qui s'est proposé à Gide pour l'aider dans ses pourparlers avec Deutsche Verlags Anstalt pour l'édition allemande des Nourritures terrestres, qui présente le sculpteur à Gide. Elle réalise le buste en mai 1930, lors du séjour de Gide à Berlin.

La fiche ne précise pas que ce buste a été la propriété de Joseph Breitbach jusqu'en 1965, passant alors dans la collection de Maurice Saillet jusqu'à la vente de la bibliothèque de ce dernier chez Drouot-Richelieu de 1989. Renée Sintenis est quant à elle célèbre pour sa sculpture qui récompense le meilleur film au festival de Berlin : l'Ours d'or.

Lot 374
Renée Sintenis
Porträt André Gide
Terracottaplastik. Höhe 33,5 cm. Auf Holzsockel (5,5 x 5 cm) montiert. Unbezeichnet. - Der Holzsockel mit wenigen leichten Wasserflecken.

Berger/Ladwig 94; Buhlmann 27

Provenienz
Privatsammlung Dr. Frank Rümelin; seitdem Familienbesitz, Norddeutschland

Ausstellungen
Berlin 1932 (Akademie der Künste), Herbstausstellung der Akademie der Künste, ohne Kat. Nr,; Hannover 1933 (Kunstverein Hannover), 101. Große Frühjahrsausstellung, Kat. Nr. 238; Berlin/Osnabrück/Regensburg/Fiedberg/Düren 1983/84 (Georg-Kolbe-Museum/Kulturgeschichtliches Museum/Ostdeutsche Galerie/Galerie im Alten Rathaus/Leopold-Hoesch-Museum), Renée Sintenis. Plastiken. Zeichnungen, Druckgraphik, Kat. Nr. 31, mit Abb. 14; Paris 1964 (Musée d' Art Moderne de la Ville de Paris), 9. Exposition-Internationale, o.Kat.Nr
Estimation : 2 500 €
*

Signalons enfin plusieurs éditions originales, dont certaines avec envoi autographe ou carte de visite jointe, qui passeront à la vente Alde d'Éditions Originales des XIXe et XXIe siècles le 2 décembre à Paris :

Lot 137
GIDE (André). - La Tentative amoureuse. Paris, Librairie de l'Art indépendant, 1893. In-12, bradel vélin ivoire, filet doré, dos lisse orné du nom de l'auteur et du titre dorés encadrés d'un filet doré, tranches dorées sur témoins, couverture et dos, étui (P.-L. Martin).
Édition originale. Un des 150 exemplaires sur vélin teinté. Bel exemplaire relié en vélin par Pierre-Lucien Martin.
Estimation : 300 € / 400 € 

Lot 138
GIDE (André). - Les Nourritures terrestres. Paris, Société du Mercure de France, 1897. In-12, demi-chagrin marron avec coins, tête dorée, couvertures et dos (Durvand).
Édition originale. Envoi autographe signé au directeur de la revue L'Art et la vie, Maurice Pujo. De la bibliothèque Arnold Naville, avec ex-libris.
Estimation : 800 € / 1 000 € 

Lot 139
GIDE (André). - L'Immoraliste. Paris, Société du Mercure de France, 1902. In-16, broché, couverture bleue.
Édition originale de l’une des œuvres les plus significatives de Gide, qui « consacra son originalité et sa maîtrise aux yeux du public lettré » (En français dans le texte, n°330).
Tirage unique à 300 exemplaires sur vergé d’Arches. Édition typographiquement imitée de la deuxième édition du Faust de Goethe traduit par Nerval, dite « édition bleue », parue en 1835. Envoi autographe signé, dont le nom du destinataire a été découpé. Couverture insolée avec petites déchirures sans manque. Talvart & Place, VII, 42, n°16-A.
Estimation : 600 € / 800 € 


Lot 141
GIDE (André). - La Symphonie pastorale. Paris, Nouvelle Revue Française, 1919. In-16, broché, couverture bleue.
Édition originale. Exemplaire du second tirage avec le titre et le dos de la couverture à la date de 1920 et l'achevé d'imprimer du 15 décembre 1919. Un des 143 exemplaires in-8 tellière sur vergé d'Arches, celui-ci un des 100 réservés aux bibliophiles de la NRF, nominatif pour M. Ch. Chatelin. Talvart & Place, VII, 46, n°32-A.
Estimation : 1 000 € / 1 200 € 

Lot 142
GIDE (André). - Morceaux choisis. Paris, Nouvelle Revue Française, 1921. In-16, broché, chemise demi-maroquin noir et étui.
Première édition, en partie originale, de cette anthologie qui comprend une dizaine de textes inédits, illustrée d'un portrait-frontispice. Exemplaire annoté par Paul Souday et enrichi de 3 feuillets autographes du critique. En marges des pages : critiques et éloges, questions ironiques et interjections (« t. b. », « c'est vrai », « Il n'y a pas de perfection partielle », « idiote équivoque », « sale chrétien », « galimatias », « oui », « non », « merde », ), points d'interrogations et d'exclamations, un nom propre masqué restitué, passages marqués d'un trait, commentaires concernant les avis de Gide sur Balzac, Barrès, Baudelaire, etc. Par exemple, Gide assume son individualisme face aux critiques de Barrès (p. 56), et Paul Souday inscrit en marge : « Ne vous inquiétez pas de cela. Soyez objectifs ! Cherchez le vrai et le beau ». Le manuscrit autographe de Paul Souday, index de ses remarques principales formulées dans l'ouvrage de Gide (au verso de deux ff. in-12 portant des brouillons autographes signés de lettres, placés dans un enveloppe de papier cristal montée en tête).
Une carte de visite d'André Gide (« en voyage ») est également jointe. Des bibliothèques Paul Souday (1930, n° 300) et Lucien-Graux (1959, IX, n°105), avec ex-libris.
Estimation : 500 € / 600 €


Lot 143
GIDE (André). - Ensemble cinq ouvrages.
Nouveaux prétextes. Réflexions sur quelques points de littérature et de morale. Paris, Mercure de France, 1911. In-12, broché. Édition en partie originale. Exemplaire du service de presse. La Marche turque, extrait de La Nouvelle revue française, n° 68, 1er août 1914. In-8, bradel demi-toile grège. Édition préoriginale d'un passage de son Journal rédigé lors de son voyage en Turquie en avril-mai 1914. Attendu que... Alger, Charlot, 1943. In-8, broché. Première édition sous ce titre de ce choix d'« Interviews imaginaires ».
– Émile Verhaeren. Liège, Lampe d'Aladdin, 1927. Petit in-12, bradel demi-maroquin noir avec coins, tête dorée, couverture. Édition originale. Un des 40 exemplaires sur vélin teinté, nominatif. Hommage à André Gide. 1869-1951. Numéro spécial de La Nouvelle revue française, novembre 1951. In-8, broché. Édition originale parue l'année de la mort de Gide, exemplaire numéroté sur vélin Lafuma-Navarre. 4 planches hors texte.
Estimation : 200 € / 300 €

Carrive, aux alentours de Gide


Le 17 novembre 2016, Tajan proposera aux enchères la bibliothèque de Jean Carrive, curieusement réduit à l'état « d'écrivain surréaliste », puisqu'il n'est question ici que de sa bibliothèque surréaliste et de ses échanges avec les membres du mouvement.

Né en 1905 dans une famille protestante modeste du Bordelais, le jeune Jean Carrive écrit à Breton alors qu'il n'a que 15 ans.
Une relation se noue rapidement, relation forte comme on peut le voir dans l'une des lettres de Breton mises en vente, et dans laquelle il est rapidement fait mention d'André Gide :

« Depuis trois ans que je dirige Littérature, avec tout le désespoir que cela suppose, je n’ai jamais reçu de lettres qui aient autant de raisons de m’émouvoir que les vôtres. Dans ce conflit, après tout terrible, qui est celui du subjectif et de l'objectif, je n'ai rien enregistré pour mon compte que de déplorable. Les rencontres sont rares. Moi qui ai écrit spontanément à Valéry (1913), à Apollinaire (1915), à Tzara (1917), à Picabia (1918), et même à Baron (1922), il est extraordinaire qu’on soit venu me trouver (Eluard, Gide ! Proust ! Péret). C’est à se demander bien souvent si ce qu’on croit faire (dans le sens de l’absolu, pourquoi pas ?), n’est pas tout à fait vain et comment il se fait, tout de même, que presque personne au monde n'ose ce geste que vous avez fait et qui, c'est sans doute très sot, me rend tout-à-coup une foi immense. Je vous disais que j'avais presque toujours fait les premiers pas. Je n’ai jamais rencontré, ce qui s’appelle rencontrer, que Vaché (ah ! oui) et Aragon. Mais vous, vous venez en somme de très loin, et vous touchez d’emblée à un de mes deux ou trois points sensibles : Ducasse, Sade aussi, ce qui est beaucoup plus curieux. De cela, je vous rends infiniment grâce, et rien que pour ces paroles, vous me trouverez toujours quand vous aurez besoin de moi. »

On est en 1923, Carrive a 18 ans, Breton à peine dix de plus. Il cheminera encore quelques années avec les surréalistes, comme en témoignent les archives André Breton, puis s'éloignera à partir de 1928, sans rompre complètement avec Breton. C'est probablement grâce aux recommandations de ce dernier, qu'aux côtés d'Adamov et Monny de Bouly, il commence à s'intéresser à Kafka, avant de poursuivre ses recherches à Breslau, l'actuelle ville polonaise de Wroclaw alors allemande, où il rencontre sa future épouse, Charlotte Behrendt.

La jeune femme est issue de la bourgeoisie cultivée, le fameux « Bildungsbürgertum », d'une famille d'origine juive, convertie au protestantisme et à la « Kulturreligion » : l'un de ses ancêtres est Moïse Hess, le premier communiste et sioniste allemand, qui publiait la Gazette Rhénane avec Karl Marx à Paris ; son père, Fritz Behrendt, était l'architecte de la ville de Breslau ; sa mère et sa tante furent les premières femmes allemandes de formation universitaire... Un milieu qui n'est pas sans rappeler ceux fréquentés par Gide en Angleterre et au Luxembourg.

Après l'arrivée au pouvoir d'Hitler en 1933, Jean Carrive convainc Charlotte de s'installer en France, en Gironde. Ils se marient en 1934 et commencent leurs travaux de traductions, lui Kafka, elle Rilke. Carrive traduira les pièces courtes de Kafka, tandis que Vialatte s'occupe des romans, ou de la pièce Le Procès dont Gide et Jean-Louis Barrault tireront une pièce.

Parmi les nouvelles amitiés littéraires de cette époque, citons encore ceux que Carrive nomme « les Pierre géniaux »: Pierre Bertaux, Pierre Leyris et Pierre Klossowski, qui avaient été tous trois élèves dans la même classe au lycée Janson-de-Sailly. Gide était alors le « répondant » du jeune Pierre Klossowski, avant d'en faire, brièvement, son secrétaire. Klossowski dont la mère est née, comme Charlotte Carrive, à Breslau...

C'est d'ailleurs Klossowski qui prononcera l'oraison funèbre à la mort de son ami Carrive, en 1963 :
« Toute votre vie si intense, si rapide et si allègrement dépensée dans la solidarité des souffrances, mais aussi dans une franche aspiration à la beauté de la vie (…), votre certitude de retrouver et de maintenir la splendeur des mondes disparus comme autant de raisons d'être pour l'homme aujourd'hui, voilà bien ce qui fait de vous une digne et singulière figure de la race humaniste du libre examen, cette secrète nation qui, par-delà la révocation de l'édit de Nantes, a marqué et approfondi la conscience française en l'enrichissant de cette rare propension à une incessante interrogation de soi-même, la douant aussi d'une curiosité jamais satisfaite à l'égard de tout ce qui doit décider de nos destins. »
Il ne semble pas y avoir de traces d'échanges entre Gide et Carrive, malgré ces passerelles et points communs.

samedi 29 octobre 2016

Gidobaque, mais quand même swag


Le phénomène gidobaque peut aussi donner lieu à d'amusantes, même si approximatives, tentatives d'actualisation :

vendredi 21 octobre 2016

Du côté de la Twittosphère

Emmanuel Macron était à Montpellier mardi 18 octobre pour le troisième et dernier meeting de « diagnostic » de l'état de la France.

« Après "La France qui subit" à Strasbourg et "la France qui choisit" au Mans, c'est sur le thème de "la France qui unit", que l'ancien ministre de l'Economie a enjoint pendant près d'une heure et demie la France à ne pas se penser "fragile", en citant pêle-mêle Albert Camus, André Gide, Jean Vilar mais aussi Danton et les tirailleurs sénégalais. », nous apprenaient les journaux dès le lendemain.

La twittosphère nous apprenait même qu'Emmanuel Macron avait soulevé les foules avec l'évocation de... La Symphonie pastorale !













En voilà un qui a retenu les leçons de son professeur de français...

Ce qui ne sera peut-être pas le cas de cette lycéenne qui vient d'achever Les Faux-monnayeurs :










Le phénomène désormais connu sous le nom de code "Gidobaque" n'en est qu'à ses premières victimes...


BAAG 191/192


Le Bulletin des Amis d'André Gide, n°191-192 automne 2016, est paru. Il est entièrement consacré à la publication des interventions des 3èmes Journées Catherine Gide qui, en avril dernier au Lavandou, se penchaient vers la Petite Dame.

Sommaire :

  • Peter SCHNYDER et Juliette SOLVÈS : « Je me réjouis immodérément de vous revoir. » Quelques particularités de la Correspondance André Gide - Maria Van Rysselberghe :
  • Martine SAGAERT : Maria Van Rysselberghe, une femme libre, une personnalité littéraire
  • Pierre MASSON et Cornel MEDER : Maria Van Rysselberghe et Aline Mayrisch, histoire d'une amitié 
  • Raphaël DUPOUY : M. Saint-Clair, un pseudonyme éclairant
  • Pierre MASSON : Gide sous le regard de la Petite Dame
  • Jean-Pierre PREVOST : André Gide et la graphologie
André Gide aux Treilles : Chronique bibliographique
Gidiana
Cotisations et abonnements 2017

Pour les membres de l'Association des Amis d'André Gide, il s'accompagne d'une nouvelle édition du Journal 1891-1892 de Madeleine Rondeaux, présenté et annoté par Pierre Masson.

Bonne idée que de donner une vie propre à ce court texte, que Claude Martin avait publié dans les BAAG n°35 et n°36 de juillet et octobre 1977. Deux carnets que Schlumberger avait signalés dans Madeleine et André Gide sans en mesurer l'importance.

Ce Journal destiné à maintenir le lien entre les deux cousins, au moment crucial de la parution des Cahiers d'André Walter, et donc de la demande en mariage de Gide à Madeleine, témoigne de la proximité culturelle autant qu'amicale (pour étrange qu'elle soit, c'est encore l'épithète qui convient le mieux...) des deux jeunes gens.

Dans son introduction, Pierre Masson souligne également tout ce que ce mariage longtemps qualifié d'infertile — acarpe, aurait dit Gide — a eu bien au contraire de productif. Madeleine s'incarnant tour à tour dans les personnages féminins de Gide, mais nourrissant également ses images, ses thèmes ou même son saugrenu...

Gide-Malraux à Carros




L'exposition Gide-Malraux, 30 ans d'amitié, poursuit sa route et fait halte du 5 novembre au 17 décembre à Carros, dans les Alpes-Maritimes.

samedi 1 octobre 2016

André Gide inspire David Maes au Musée d'Uzès




Depuis 2010, le musée d’Uzès s’associe à la biennale de l’estampe organisée par l’association SUDestampe dans divers lieux du Gard. Du 30 septembre au 31 décembre 2016, David Maes investit à nouveau la salle André Gide du musée pour y présenter des estampes spécialement réalisées pour l’exposition, librement inspirées par deux livres d’André Gide : Thésée et Et nunc manet in te.

L'artiste explique ce qui, dans les œuvres de Gide, continue de l'inspirer :
« Brigitte Chimier, conservateur du musée Georges Borias, m’a proposé de réaliser une série de gravures en relation avec l’œuvre d’André Gide. Ce sont ces gravures que je présente au musée dans le cadre de la biennale de l’association SUDestampe et de la manifestation miNuit Blanche à Uzès.

Deux livres de Gide ont attiré mon attention, Thésée (1946) et Et nunc manet in te (1951). Le thème du sacrifice parcourt ces deux livres, et c’est à partir de ce thème que j’ai choisi de travailler. Sacrifice compris dans sa double acception : celle de l’offrande faite à une divinité, celle du renoncement volontaire à quelque chose ou à quelqu’un.

Offrande

Dans Thésée, Gide bâtit un récit autour de ce personnage complexe de la mythologie grecque. Thésée est celui qui réussit à tuer le Minotaure, ce monstre possédant le corps d’un homme et la tête d’un taureau, né des amours de Pasiphaé et d’un taureau blanc envoyé par Poséidon. Le Minotaure fut enfermé par le roi Minos dans le labyrinthe, situé à Cnossos (Crète) et conçu par Dédale, afin qu’il ne puisse s’en échapper et que nul ne découvre son existence.

Lors d’une guerre provoquée par la mort d’un des fils du roi Minos, Athènes est affamée par un terrible siège qui ne prend fin qu’à partir du moment où les Athéniens proposent à Minos de choisir le tribut qu’il veut pour le lever. Minos exige alors que tous les neuf ans, Egée, roi d’Athènes et père de Thésée, lui livre sept jeunes hommes et sept jeunes femmes qui seront sacrifiés au Minotaure. Thésée se porte volontaire.

C’est à partir de cette histoire de sacrifice de quatorze jeunes personnes que j’ai choisi de réaliser quatorze portraits de jeunes gens que je connais ou que j’ai eu l’occasion de croiser. Une partie de cette série de portraits occupe un des murs de la salle André Gide. Parmi ces portraits se trouve une gravure du Minotaure que j’ai réalisée en 2002 pour l’exposition « Le Minotaure » qui a eu lieu à la Chapelle des Jésuites à Nîmes.

Renoncement
Face à ces portraits se trouve un grand triptyque : I am a Wonder : Among Flowers. Cette gravure est dédicacée à Madeleine Gide, femme d’André Gide et le sujet de Et nunc manet in te (ce titre est tiré d’un poème de Virgile, le Culex, et signifie « Et maintenant elle survit en toi »). Ecrit peu après la mort de Madeleine, Et nunc manet in te apparaît comme une sorte de confession dans laquelle Gide dresse le portrait de sa vie conjugale, son côté « impossible » dû à son homosexualité. Pour cette raison, mais pas seulement, Madeleine a passé sa vie dans une forme de renoncement au point où elle en devient presque absente.

I am a Wonder : Among Flowers n’est pas un portrait de Madeleine, mais une tentative de lui donner une certaine présence dans cette salle dédiée à son mari. »

David Maes, I Am a Wonder : Among Flowers (Pour Madeleine), triptyque, pointe-sèche, 2016


Exposition David Maes, « Offrandes inégalables », du 30 septembre au 31 décembre 2016. Musée Georges Borias, ancien Evêché, 30 700 Uzès. Tél. 04 66 22 40 23. Blog du musée.
Ouvert du mardi au dimanche, en octobre de 15h à 18h, en novembre et décembre de 14h à 17h. Fermé le 1er novembre et le 25 décembre.
Entrée : 3€. Groupes : 1,50€/personne. Gratuit pour les scolaires.

Visites guidées : plein tarif 5€, tarif groupes 3€ / personne, sur réservation.

Programme complet de la Biennale 2016 SUDestampe sur www.sudestampe.fr

mardi 20 septembre 2016

Gide-Wilde. Deux immoralistes à la Belle Époque

Pierre Masson, Jean-Pierre Prévost,
André Gide-Oscar Wilde. Deux immoralistes à la Belle époque
Editions Orizons, septembre 2016, 312 pages
23€, ISBN : 979-10-309-0092-7



Voilà un livre qui tombe à pic. Alors que s'ouvre bientôt l'exposition Oscar Wilde, l'impertinent absolu au Petit Palais, Pierre Masson et Jean-Pierre Prévost publient André Gide – Oscar Wilde. Deux immoralistes à la Belle Époque (éditions Orizons). Nos amis nous ont parlé depuis plusieurs années de ce livre qu'ils avaient écrit et qui ne trouvait pas d'éditeur. Saluons donc le sens de la publicité d'Orizons !

Il faut dire que devant le côté « fatras » de l'ouvrage, il y avait peut-être de quoi prendre peur. Et un véritable éditeur aurait sans doute mis bon ordre dans cette accumulation d'éléments thématiques, de chapitres disparates, d'illustrations pas toutes utiles ni très bien choisies, le tout en marge du récit principal... (Sans parler de l'affreuse couverture, de la titraille déconcertante ou des numéros de notes décalés...) Les auteurs renoncent heureusement assez tôt à vouloir dresser le portrait de l'époque pour se centrer sur la chronologie, ici capitale.

Les deux derniers tiers, appuyés sur des extraits de la Correspondance de Gide et ses souvenirs ou ceux de ses proches, en se concentrant précisément sur Gide, montrent très bien comment ce dernier va recomposer un Wilde à sa façon, et, ce faisant, intégrer leurs brèves rencontres et la silhouette de Wilde dans différents récits. Ou encore comment ce que les auteurs nomment « l'épisode crucial d'Alger », va être lui aussi réinventé et réinjecté dans l'œuvre.

Il faut donc dépasser le côté un peu raté de la forme, qui risque de faire trébucher le lecteur à tout instant, pour s'attacher au texte et au fond tous deux très intéressants. Le livre permet, par son analyse des prolongements wildiens dans l'œuvre de Gide, de réévaluer les rapports entre les deux écrivains : pour Gide, des rapports jusque là très surévalués sur le plan personnel, et sous-estimés sur le plan littéraire...

Bibliographie gidienne in progress


Stéphanie Bertrand, maître de conférences en langue et littérature françaises (XXe-XXIe siècles) à l'Université de Lorraine, nous signale l'avancée de son projet de bibliographie gidienne en ligne. Un peu plus de 600 références bibliographiques, des œuvres de Gide à leurs commentaires sous formes de mémoires, thèses, ouvrages ou articles, sont déjà recensés à l'adresse : https://www.zotero.org/groups/bibliographie_andr_gide/items




La base de données est hébergée par Zotero, un outil 
collaboratif de gestion et de partage de références.


samedi 10 septembre 2016

Exposition André Gide et la Normandie



Pour la première fois, une exposition explore les liens familiaux et amicaux du côté normand d'André Gide : Rouen, La Roque-Baignard, Cuverville... Mais d'autres épisodes sont également évoqués comme la rencontre avec Wilde à Berneval, les visites à Marcel Drouin à Alençon, le voisinage de Schlumberger au Val-Richer et bien sûr les séjours chez l'ami Roger Martin du Gard.

C'est d'ailleurs au château du Tertre, à Serigny près de Bellême, dans l'Orne, que cette exposition réalisée par Jean-Pierre Prévost avec le soutien de la Fondation Catherine Gide et de Groupama, est présentée pour la première fois. Une belle exposition dans un très bel endroit, à voir du 10 septembre au 9 octobre, les samedis et dimanches de 15h à 18h. Entrée gratuite.

Lire l'article consacré à l'exposition dans l'hebdomadaire Le Perche : http://www.le-perche.fr/50047/andre-gide-fait-escale-au-chateau-du-tertre/

dimanche 7 août 2016

Gide et Présence Africaine

Passée il y a quelques années aux enchères, une lettre de Gide est actuellement proposée par la Galerie Thomas Vincent. Elle est adressée à Gaston Criel, poète et fondateur en 1938 du cercle « Pour la poésie », qui a été en 1945 le secrétaire d'André Gide. Paul Eluard l'avait présenté à Paulhan, qui l'avait recommandé à Gide. La lettre est non datée, mais la question de Gide : « L’adresse que j’inscris sur cette enveloppe, est-elle encore valable ? » indique toutefois qu'elle date d'après l'époque où Criel travaillait pour Gide.

Gide qui se fait encore une fois entremetteur, suggérant à Criel de rencontrer et de « guider un peu » un certain Moudio V. Eyoum, « chanteur nègre ». Eyoum Vincent Moudio est né à Douala, au Cameroun. Arrivé en France dans les années 30, il se produit dans les music-halls avec un spectacle mêlant histoires drôles, chansons pimentées et danses. Eyoum Moudio devient vite une figure du show-business, au sein d'un réseau influent.

« Eyoum Moudio qui connaissait sur le bout des doigts le Tout-Paris des Arts et des Lettres, nous apprit comment forcer, par exemple, la porte de l'appartement d'André Gide », se souvient Alioune Diop (20e Anniversaire : Mélanges: réflexions d’hommes de culture, Présence Africaine 1947-1967, Paris, Présence Africaine, 1969). C'est en grande partie grâce au réseau de Eyoum Moudio que Diop va créer la revue Présence Africaine en novembre 1947. Gide signera d'ailleurs l'avant-propos du premier numéro de cette revue.



Biskra : une exposition en septembre

Du 23 septembre 2016 au 22 janvier 2017, l'Institut du monde arabe consacrera une exposition à Biskra, reine du désert. Cette exposition présentera surtout des peintures et photographies, mais convoquera aussi d’autres champs de la création, parmi lesquels la littérature, et plus particulièrement celle de Gide.

Présentation de l'exposition :

Le projet est né de l’expérience vécue à Biskra par certains artistes de l’avant-garde européenne autour de 1900 : les textes que la ville a inspirés à André Gide comme L’Immoraliste ou Les Nourritures terrestres, le très célèbre Nu bleu, Souvenir de Biskra de Henri Matisse, et les musiques enregistrées dans les ksour par Béla Bartók qui ont fortement influencé ses compositions des années 1920.

Mais qu’était Biskra lors de la venue de ces artistes ? Une oasis pittoresque, station de tourisme d’hivernage pour les pulmonaires dotée de luxueux hôtels et qui, après l’Indépendance, est devenue une métropole de quelque 300 000 habitants et la capitale d’une wilaya. L’exposition propose de replacer les œuvres d’artistes, du Français Eugène Fromentin en 1848 à l’Algérien Chaouia Noureddine Tabhera en 2014, dans un contexte éclairé par des documents inédits ouvrant de nouvelles perspectives.

Le commissaire de l’exposition, Roger Benjamin, épaulé par des conseillers et historiens algériens propose une lecture postcoloniale des œuvres et des documents qui souligne la richesse des interconnexions entre les faits et leurs représentations. Cette lecture rend compte de la diversité des « héritiers » de cette histoire : les citoyens de Biskra et de la wilaya contemporaine, les immigrés biskris vivant en France, les anciens Biskris pied-noir (italiens, français, juifs), sans oublier le public qui éprouve un attrait certain pour la majesté de cette région du Sahara et de sa population.



Vidéo : Auguste et Marius MAURE, Photographes à Biskra
de Gilles Dupont, du blog Ils ont photographié Biskra

dimanche 10 juillet 2016

Diario, le Journal de Gide en italien


Le mois dernier est paru en Italie une nouvelle traduction du Journal de Gide, en deux volumes de 1696 et 1568 pages, chez Bompiani. Il s'agit de la maison d 'édition qui avait déjà publié dans les années 50 une traduction en trois volumes de la première version du Journal. Cette fois, l'éditeur Piero Gelli et le traducteur Sergio Arecco proposent la version intégrale du Journal de Gide, telle que Martine Sagaert et Eric Marty l'avaient établie pour l'édition dans la Pléiade en 1996 et 1997.

 Liens vers le site de l'éditeur :

Cette parution a donné lieu à plusieurs articles dans la presse italienne, parmi lesquels :

Gide, le inconfessabili confessioni dell’immoralista, par Piero Gelli, l'éditeur de  ces deux volumes, dans La Stampa

André Gide giorno per giorno: fra poesia, Cristo e ragazzini, par Luigi Mascheroni dans Il Giornale

Donne, uomini e altre passioni: i diari integrali di André Gide, par Daria Galateria dans Il Venerdi, le supplément de La Repubblica
 

dimanche 3 juillet 2016

Deux parutions

 
Après Proust et Lyautey (2009, Non Lieu), le prolifique Christian Gury publie un Gide et Lyautey. Précédé de Gide et certains faits-divers, toujours aux éditions Non Lieu. Sur la rencontre entre Gide et Lyautey, lors d'un voyage de Gide en mars-avril 1923 au Maroc en compagnie de Paul Desjardins, Pierre Hamp et Henri Bidou, on sait surtout que Gide a passé son temps à fuir Lyautey.

Deux raisons à cela : Gide détestait le côté officiel, protocolaire, et les manières de Lyautey. Lors de sa rencontre avec de Gaulle en 1943, Gide comparera d'ailleurs drôlement la séduction des deux hommes : « on ne sentait point chez lui [de Gaulle], comme à l'excès chez Lyautey, ce désir ou souci de plaire qui entraînait ce dernier à ce que ses familiers appelaient en riant : "la danse de la séduction". »



Présentation de l'éditeur :
André Gide collectionnait les « découpures » de presse, notamment relatives aux faits divers et affaires de mœurs de la Belle Epoque, en liaison avec l'écriture de Corydon, son essai sur l'homosexualité. Les thèmes de l'erreur judiciaire et du scandale l'interpellaient, sa propre vie flirtant avec les risques, tant en Europe qu'en Afrique. En Afrique justement, début 1923, il part avec l'intention de faire « des rencontres ». Il a accepté l'invitation d'Hubert Lyautey à lui rendre visite au Maroc. Gide a d'autant plus de raisons d'admirer Lyautey qu'il peut le considérer comme un disciple, sinon, mieux, comme son meilleur disciple, les théories de l'écrivain se trouvant par lui mises en pratique, à grande échelle. En effet, le maréchal-résident a démontré, sur le sol du Maroc, que « l'uranisme n'est en lui-même nullement néfaste au bon ordre de la société, de l'État ; tout au contraire », illustrant cette affirmation, d'allure certes un peu téméraire, martelée aux dernières pages de Corydon. Aujourd'hui, la justice sanctionnerait les mœurs licencieuses du militaire comme celles de l'écrivain


Après les Souvenirs d'un buveur d'éther de Jean Lorrain et avant Sixtine, de Remy de Gourmont, le Mercure de France réédite une autre petite pépite : Olivia, de Dorothy Bussy, traduit avec l'aide de Roger Martin du Gard (coll. Bibliothèque étrangère). L'amoureuse de Gide lui avait fait lire cette longue nouvelle dès 1933, mais Gide n'y avait pas apporté une grande attention. La Petite Dame nous raconte la suite de l'histoire, et le formidable succès d'Olivia, qui paraîtra finalement en 1949 :
« Il a mis beaucoup d'insistance (une insistance dans laquelle il y a sans doute un peu de remords) à me faire lire le manuscrit d'Olivia, une nouvelle écrite par Dorothée, qu'elle lui avait montrée il y a quinze ans et à laquelle il n'avait attaché aucune importance. Malgré le découragement qu'elle en avait éprouvé, elle a fini par la faire lire à ses amis anglais du monde littéraire, où elle a eu un tel succès qu'elle se décide à la publier. Martin, qui l'a lue dans une sommaire et très mauvaise traduction de Dorothée, s'est proposé pour la refaire en français, ce qui ne laisse pas de l'embarrasser un peu, vu son ignorance de l'anglais, mais à en juger d'après le premier chapitre qu'il a soumis à Gide, il nous paraît qu'il va s'en tirer admirablement bien, sinon sans beaucoup de peine. »
Olivia connaîtra un beau succès, le cinéma et le théâtre s'y intéresseront. Un film sera tiré en 1950, réalisé par Jacqueline Audry, avec Edwige Feuillère et Simone Simon dans les rôles principaux. Une façon de boucler la boucle puisque c'est le film Jeunes filles en uniforme (Mädchen in Uniform, 1931), d'après la pièce de Christa Winsloe, dont Gide et Dorothy Bussy avaient parlé dans leur Correspondance, qui incitera Dortothy à lui envoyer sa nouvelle...


Présentation de l'éditeur :


  En relevant la tête, j’ai rencontré son regard fixé sur moi. Sans réfléchir, sans avoir prémédité mon geste, j’ai cédé à une impulsion inconnue d’une violence irrésistible et je me suis tout à coup trouvée à ses genoux, couvrant ses mains de baisers et répétant à travers mes sanglots : « Je vous aime ! Je vous aime ! Je vous aime ! » Je sentais sous mes lèvres la douce chaleur de sa peau, la dureté de ses bagues

     Venue parachever son éducation en France, Olivia, une jeune Anglaise de seize ans à peine, va être subjuguée par la directrice de son école, la très belle MlleJulie qui lui fait découvrir la poésie, le théâtre, la peintureRien de plus vrai, de plus frais que ce premier amour d’une adolescente entraînée sans défense dans une aventure qui la dépasse. Mais si elle sait très bien jouer avec les sentiments exaltés de sa jeune élève, Mlle Julie vit en même temps une autre passion. Avec pour seules armes sa candeur et sa pureté, Olivia va se retrouver au cœur d’un drame. « Lyrisme passionné, spontanéité qui jamais n’échappe au contrôle, goût parfait, tels sont les caractères distinctifs de l’art de l’auteur », a écrit Rosamond Lehmann, qui ajoutait : « c’est pourquoi Olivia est une des rares œuvres que je relirai avec la certitude de n’en avoir jamais épuisé le suc. »

      Quand Olivia parut en Angleterre en 1949, simplement signé « par Olivia », ce fut un succès immédiat. On sait aujourd’hui que l’auteur se nommait Dorothy Bussy, qu’elle était la sœur de Lytton Strachey, et une grande amie de Virginia Woolf et d’André Gide qu’elle traduisait en anglais. Née en 1865 et décédée en 1960, elle n’a écrit que ce mince roman devenu un classique.

dimanche 26 juin 2016

André Gide à La Roque-Baignard


 La Roque-Baignard, dans le Calvados


« La commune est si petite qu'elle n'avait, à proprement parler, pas de mairie. En tenait lieu la salle commune d'une de mes fermes, sur le bord de la route, tout près de la petite église. »

Cette description de La Roque-Baignard par Gide, dans Jeunesse, texte paru en 1931 dans la NRF et repris dans les Feuillets d'automne, pourrait être toujours valable, à ceci près qu'une charmante et toute petite mairie existe désormais. La commune y a toujours plus ou moins honoré son grand homme, comme en témoigne la stèle posée près de la mairie — « Que certains visiteurs prennent pour la tombe de Gide », nous confie Monsieur le Maire — et cet attachement à ce riche patrimoine littéraire, et à l'ancien maire du village, se confirme aujourd'hui encore.


La stèle en mémoire de l'ancien maire


C'est Edouard Rondeaux, grand-père d'André Gide, qui achète tour à tour le manoir de Cuverville (qui reviendra à son fils Émile, père de six enfants, dont Madeleine, cousine et future femme d'André Gide, Jeanne et Valentine), le château de la Mi-Voie à Amfreville-la-Mivoie (acheté en 1850 où vivait la grand-mère d'André) et celui de La Roque-Baignard (qui revient à Juliette, la future Mme Paul Gide, mère d’André).

Les vacances d'été se passent alors d'abord à La Roque, puis à Cuverville. Gide fera de cette île doublement entourée de douves et de bois sombres au fond de la vallée, le vert paradis de l'enfance dans Si le grain en meurt et l'humide Morinière de l'Immoraliste. A la mort de sa mère en 1895, Gide hérite du château et de ses six fermes, couvrant quelques 425 hectares. Il prendra prétexte d'un entretien coûteux et difficile pour céder à sa femme Madeleine qui préfère sa maison de Cuverville, et revendra La Roque en 1900, « une partie des fermes à Charles Mérouvel, l'illustre auteur de Chaste et flétrie ; puis le reste à un M. M... qui bientôt le revendit au comte Hély d'Oissel » (Jeunesse, NRF, 1931)



Doublement ceint de douves et de bois sombres, le château de La Roque Baignard


C'est ainsi qu'à peine propriétaire du château, Gide va devenir maire du village, sans même s'être présenté... Il est élu conseiller municipal au scrutin du 3 mai 1896, avec 28 voix sur 36. Quelques jours plus tard, le conseil municipal met Gide à sa tête, avec 7 voix sur 10. Selon Gide, il faut y voir moins l'envie de porter le jeune châtelain à la mairie que les manigances de son régisseur Armand Désaunay, dépeint sous le nom de Bocage dans L'Immoraliste et de Robidet dans Jeunesse.
« En 1896, la nouvelle que, certain beau jour de vacan­ces, vint triomphalement m'annoncer Robidet tomba sur moi comme une catastrophe. Grâce à ses intrigues zélées, on venait de me nommer maire. Il manigançait cela depuis longtemps; à mon insu, il va sans dire. Mais d'abord il fallait attendre que j'eusse atteint l'âge légal et que le maire à qui je devais succéder eût cédé la place. Il mourut comme j'entrais dans ma vingt-cinquième année. Robidet, qui déjà cumulait les fonctions de garde et de régisseur, briguait encore celles d'adjoint, auxquelles le grand service qu'il rendait ainsi à la commune et à son maître, le désignait naturellement. Il tablait sur mon peu de goût pour le commandement, et pensait fort pertinemment que ma douceur de caractère et mon jeune âge lui assureraient tout pouvoir. Robidet, qui déjà régnait du vivant de ma mère et que j'avais hérité d'elle en même temps que la propriété, pensait peu, parlait beaucoup et jaugeait chacun d'après lui-même. Sa conduite était uniquement guidée par l'intérêt et le respect des convenances. «Oh ! Monsieur, ça ne se fait pas », me disait-il lorsque je voulais faire monter, dans la carriole qui nous menait au marché de Lisieux, un estropié cheminant pénible­ment sur la route; et, pour le dépasser plus vite, un coup de fouet mettait au galop le cheval. Au surplus, d'une honnêteté fort relative, mais sauvegardant les apparences et habile-à s'abriter derrière les « usages », dès qu'il m'advenait de vouloir examiner ses comptes.
Il avait l'air de se mettre, à mes dépens, bien avec tous. C'est ce qui peut expliquer que les six fermes et les bois qui constituaient le domaine de La Roque, étalés sur plusieurs communes, ne m'aient jamais rapporté que des soucis. » (Jeunesse, NRF, 1931)


La place du village rebaptisée place André Gide


Sur le ton lyrico-comique de ses premières lettres échangées avec Paul Valéry, Gide décrit drôlement l'épisode :
« La Roque 18 mai 96

Cher vieux,

On vient de me faire un sale coup. J'arrive ici pour rafisto­ler quelques toitures qui laissent l'eau pourrir les récoltes, et prendre part aux élections municipales en tant que conseiller tout neuf de trois jours, et, bien malgré moi, misère du bon Dieu ! je suis nommé maire au premier tour de scrutin, avec une écrasante majorité !! Des gens qui ne m'ont jamais vu !
— je ne leur ai jamais rien fait ! — faut-il que le monde soit méchant, tout de même ! —

Aujourd'hui, j'ai mal aux che­veux, et de la fièvre plein les mains tant j'ai respiré l'odeur de leurs sales boissons. Tu ne te fais pas idée de ça — tous sont aux trois quarts perdus d'alcool ; le plus robuste a com­mencé à tourner de l'œil au milieu du conseil et peu s'en faut qu'il n'ait claqué sur place ; il pleurait surtout de songer qu'il lui faudrait peut-être se modérer ; il en est de si avancés qu'un verre ou deux suffisent à les perdre ; les enfants nais­sent idiots, crispés, ou ne peuvent plus naître du tout. N'empêche que je commence mes fonctions par en recevoir deux de naturels. Le pire c'est que c'est assez rare et qu'il ne veut plus naître personne ; un peu de sensualité les sauverait — je vais faire venir des Aphrodites. L'ancien maire ne savait pas signer son nom, et mon adjoint, qui lui ne boit pas, ne sait même pas lire. Demain, il faudra fout[re] à la porte du presbitère [sic] un curé qui fait des rosseries et discrédite le Saint Office.

J'espérais me reposer ici à travailler ; cela m'éreinte et fait rater mes Nourritures — je n'ose plus chanter l'ivresse. » (Correspondance Gide-Valéry, Gallimard, 2009)
Quelques jours plus tard, à Valéry qui propose, pour le premier arrêté municipal pris par le nouvel édile, d'interdire la vente de la revue Le Centaure — que Gide vient de quitter — dans le territoire communal, Gide lui répond sur le même ton d'exagération bouffonne :
« Ah ! mon pauvre vieux, plains-moi — pour la première fois j'ai grogné contre l'existence. Pas un instant de loisir — des fermiers brutes, un beau temps désastreux, des répara­tions à faire partout — et quand on ne court plus pour des fermes, on court pour des affaires de mairie. Hier, j'ai passé mon jour à trinquer avec de vieux administrateurs de je ne sais quoi — puis à discuter les intérêts du canton, qui ne sont certes pas les miens — puis à voir passer à la révision de grands gaillards mal dégrossis à la face rouge et au corps pâle, où les plis des vêtements, et les bandes des suspensoirs restent marqués. Ça donne des idées peu lubriques et vous fait douter des statues... Passons — le soir, visite du curé qui est fripouille — ce matin, il faut que j'aille fouiller les armoi­res de mon prédécesseur, qui m'est hostile, et que je m'empare de tous ses papiers. Sitôt que ça ne m'embête plus à périr, cela m'amuse énormément — et je te prie de croire que le dialogue entre curé et maire, hier soir, n'était pas vul­gaire... chose admirable, je m'amusais à le prolonger... Cela vous apprend beaucoup de morigéner les vieillards. » (Correspondance Gide-Valéry, Gallimard, 2009)
 

 Au départ du village, un circuit de randonnée « sur les pas d'André Gide »

Le pays n'est à l'époque pas très différent de celui décrit par Maupassant. Et Gide est plus sensible au sort de la population qu'il ne le laisse paraître dans ces échanges potaches. Déjà, son intérêt pour la chose publique, sa fibre sociale, se manifeste. Il est alors l'un des trois plus jeunes maires de France, et compte bien prendre sa tache au sérieux, faute de pouvoir s'y consacrer à plein temps. Sa femme Madeleine — Em. Sous la plume de Gide — l'encourage d'ailleurs à ne pas se récuser lors de l'annonce de son élection.
« Em. se taisait, comprenant mieux les raisons de ma soudaine tristesse : la nature entière devant moi se désenchantait. De compliquées relations d'ordre pratique s'opposeraient désormais au désintéressement de mes regards. Mes amours avec le pays cesseraient d'être platoniques. Je me sentais déjà tout investi par l'accablant souci de nouveaux devoirs. C'en serait fait des rêveries, des promenades contemplatives. Pourtant Em. elle-même estimait que je ne pouvais me récuser. Il y allait de l'intérêt de tous, soutenait-elle. Car elle me connaissait assez pour savoir que, maire, je n'admettrais pas de ne l'être rien qu'à moitié, ne prenant rien à la légère. J'acceptai donc. Et ceux qui me prétendent insoucieux de la chose publique imaginent mal, assurément, le zèle civique que j'appor­tai dans l'exercice de mes très absorbantes fonctions. » (Jeunesse, NRF, 1931)

 La plaque en l'honneur de Gide récemment posée


Gide assistera tout de même à neuf des quatorze séances du conseil municipal tenues lors de son mandat, prononcera des mariages et des discours lors de la remise des prix à la petite école du village. Il présidera aussi des conseils de révision, voyant défiler dans le simple appareil un certain Jean Schlumberger, son voisin du château du Val Richer... 

Toutes les villes n'ont pas eu pour maire un Prix Nobel qui les a fait entrer dans l'histoire de la littérature ! Cela mérite bien les autres clins d'œil adressés ici à Gide : la place de la mairie devenue place André Gide, un chemin de randonnée « sur les pas d'André Gide ». Et enfin tout récemment la pose d'une plaque semblable à celle qu'on trouve sur le mur du cimetière de Cuverville, et créée par la Fondation Catherine Gide.


(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)


Si vous passez par là, n'hésitez pas à traverser la rue pour visiter le « Jardin nature » soigné par des bénévoles passionnés de l'Association normande pour la protection de la nature. Près de 180 espèces de plantes de la nature ordinaire ou plus rares y poussent dans le même décor que celui évoqué par le botaniste Gide : « les vallonnements herbeux, les bouquets d'arbres, les taillis, le cours de la petite rivière souvent cachée par les hauts épilobes, les aulnes et les coudriers... »