vendredi 5 février 2010

... vu par Théo Ananissoh

Dans un entretien avec Boniface Mongo-Mboussa pour Africultures, l'écrivain togolais Théo Ananissoh évoque ses modèles littéraires à l'occasion de la sortie de son nouveau roman Ténèbres à Midi, chez Gallimard :


"B. Mongo-Mboussa : Quand on évoque votre écriture, on parle du style sobre d'une écriture directe, mais je crois que ce qui vous caractérise, c'est avant tout le ton juste. Quelles sont vos sources d'inspiration ? Vos maîtres en écriture ?

Théo Ananissoh : Ah ! Ce n'est pas aisé de répondre à une telle question. Quand l'idée et l'envie de devenir écrivain viennent à l'adolescence, le temps d'y arriver, on a accumulé beaucoup de lectures, donc d'influences et de références littéraires. Ce sont souvent des écrivains et leurs œuvres entières, mais parfois aussi c'est juste un livre en passant si je puis dire. Je me souviens de tel recueil de nouvelles d'Hermann Hesse dont j'ai admiré la sérénité d'écriture quand j'avais quinze, seize ans ou, à la même époque, de tout Maxime Gorki dont l'empathie pour les êtres m'émouvait beaucoup.

Une œuvre littéraire a plusieurs aspects. Nous pouvons aimer un roman pour l'histoire ou les personnages et négliger l'écriture ou inversement ; je ne me lasse pas de relire André Gide pour l'exceptionnel exercice de l'esprit qu'est chacune de ses phrases. Thomas Mann m'a appris que le critère, c'est l'orgueil de l'esprit. Il m'a sauvé de tout cet énorme complot qui consiste à refuser d'exiger de l'Afrique des preuves de son exercice de l'esprit. Dans Ténèbres à Midi, Bamezon dit que le monde est une création humaine ; eh bien, n'y sont bien lotis que ceux qui le créent au quotidien, ce monde ! C'est présomptueux de ma part, mais vraiment Thomas Mann est un maître. C'est un écrivain pour qui veut se consacrer à l'art. Son thème fondamental, à mon sens, c'est l'artiste et sa vocation. Ses personnages principaux sont souvent des écrivains (La mort à Venise, Lotte à Weimar - où il met en scène la figure de Goethe…) ou des musiciens (comme dans Le Docteur Fautus). Quoi de plus synonyme de l'esprit que l'artiste tel que l'entend ce grand écrivain allemand, c'est-à-dire le créateur instruit et conscient ?"

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