dimanche 19 avril 2009

Correspondances, Dan Brown et Gide en dvd

Le cent soixante-deuxième Bulletin des Amis d'André Gide (Avril 2009) vient de tomber dans ma boite aux lettres – avec la volumineuse et attendue Correspondance Gide-Valéry (1000 pages pour 638 lettres, soit 176 de plus que dans l'édition précédente). Tandis que Peter Fawcett qui a établi cette nouvelle édition de la correspondance Gide-Valéry lui donne une courte mais précieuse introduction, Pierre Masson, dans ce dernier Bulletin, signe un très intéressant "Les correspondances chez Gide".

Quelques chiffres : 27 500 lettres sont actuellement connues et on en découvre encore chaque année. Sur ce total, un peu moins de la moitié émanent de Gide, un peu plus de ses 2 200 correspondants recensés. Pierre Masson donne une liste non-exhaustive de 79 publications de correspondances gidiennes depuis 1946. De son vivant, Gide a publié ses correspondances avec Raymond Bonheur, Francis Jammes, Paul Claudel et Charlie du Bos.

Pierre Masson annonce également les "à paraître" en 2009 : avec Gaston Gallimard, avec Marcel Drouin. En 2010 : avec Jean Amrouche (mort il y a 47 ans le 16 avril dernier). Ou encore avec Daniel Simond.

A lire aussi dans ce BAAG n°162 :

  • L'Immoraliste ou l'exaltation de l'inculture, par Véronique Dufief-Sanchez. La spécialiste de la notion de savoir chez les écrivains et qui avait soutenu en 2007 à la Sorbonne une habilitation à diriger des recherches intitulée "De René à l’Immoraliste. Philosophie du roman personnel (1802-1902)", revient sur le "roman personnel".

  • Le facétieux Jocelyn Van Tuyl rapproche les "Intrigues et complots" des Caves du Vatican et de Anges et Démons, best-seller de Dan Brown. L'auteur du Da Vinci Code se serait-il inspiré de Gide ? "L'hypothèse s'avère impossible à confirmer : en effet, nos tentatives de contacter Brown sont demeurées sans réponse", déplore l'auteur...

  • Manfred Schleming (de l'université de la Saar) étudie les relations franco-allemandes à travers la NRF.

  • Une nouvelle partie du Journal inédit de Robert Levesque (mars à mai 1948).

  • La suite des dossiers de presse des oeuvres de Gide.

  • Une critique de "Henri Ghéon, camarade de Gide. Biographie d'un homme de désirs" de Catherine Boschian-Campaner paru en 2008 aux Presses de la Renaissance.

A signaler enfin dans la chronique bibliographique, à la suite de l'annonce de la parution des Entretiens 2002-2003 de Catherine Gide parus récemment dans les Cahiers de la NRF chez Gallimard, cette autre annonce de la parution prochaine d'un DVD rassemblant les deux films de Marc Allégret "Gide au Congo" et "Avec André Gide" ainsi qu'en boni l'enregistrement de ces entretiens donnés par Catherine Gide.

lundi 13 avril 2009

Sur Gide "romancier"

Pour la nouvelle édition des romans et récits de Gide parue dans la Pléiade, les articles, critiques et commentaires n'ont pas manqué. En voici deux tout à fait intéressants qui s'opposent et se répondent : celui des samedis de Stéphane Denis paru dans le Figaro du 13 mars et celui de Muriel Steinmetz paru dans l'Humanité du 9 avril. Il n'est pas jusqu'à leurs titres qui en disent long : "Des romans sans romanciers", juge Denis. "C'est tout Gide dans ses romans", estime Steinmetz.

samedi 11 avril 2009

Les Faux Monnayeurs à l'écran

Après Villa Amalia, tiré du roman de Pascal Quignard, actuellement à l'affiche et faisant grand bruit, le réalisateur Benoît Jacquot commence ce mois-ci le tournage d'une adaptation des Faux Monnayeurs pour la télévision (France 2), avec l'acteur Melvil Poupaud*. On se prend à rêver d'un "Journal filmé du film Les Faux Monnayeurs", pendant du Journal des Faux Monnayeurs...

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* Et non pas Les Caves du Vatican comme l'écrit le site bibliobs...

Gide et Rimbaud dans la Pléiade

André Gide était doublement à l'honneur de la Lettre numéro 35 du Cercle de la Pléiade (février-mars 2009). Outre la nouvelle édition des Romans et Récits de Gide, la Pléiade a fait paraître les Œuvres Complètes de Rimbaud. La Lettre rappelle à cette occasion l'essai que Gide a consacré au poète, paru en 1941 dans Poésie 41 (et repris dans Essais Critiques dans la collection Pléiade) :

"Rimbaud m’apparaissait comme un poète démoniaque, un poète "maudit" entre tous et se plaisant à l’être. L’alcool ardent, la "fameuse gorgée de poison" qu’il nous invite à boire et que je dégustais avec délices, plus capiteux, plus insurgeant qu’aucun vin, ne pouvait convenir, pensais-je, qu’à des forts. Dans quelle étrange damnation n’entraînerait-il pas tous les autres ? Il ne fallut pas moins que la haute autorité de Claudel pour me rassurer. Non point tant en raison du dicton : omnia munda mundis, tout est pur aux purs, que de la parole de l’Écriture : Et violenti rapiunt illud… encore que je ne sache point trop si je ne la dois appliquer ici à Claudel lui-même plus qu’à Rimbaud : "Et les violents s’en emparent…" Mais le catholique qui s’empare ainsi de Rimbaud, avec son individualisme exaspéré, son insoumission, ses révoltes, me rappelle fort le Spartiate dont, au collège, on nous racontait la prouesse : le renard volé qu’il presse contre lui-même sous sa robe, il doit en supporter les morsures. Celles de Rimbaud sont cruelles, et presque autant que ses baisers. […] Mais peu importe après tout ce qu’il plaît à tel ou tel de voir dans Rimbaud. Le propre d’un authentique génie poétique n’est-il pas de répondre à des questions très diverses, de prêter à maintes interprétations contradictoires, de favoriser à son sujet la mésentente, d’offrir plus qu’il ne semblait d’abord, de sorte que jamais, avec lui, l’on ne puisse s’en tenir là ? Il y a ce qu’il a voulu dire, ce que l’on croit qu’il a voulu dire ; mais le plus important sans doute reste ce qu’il a dit sans le vouloir et malgré lui."

William Blake : d'une rétrospective à l'autre

"Charlie Du Bos m'envoie The Marriage of Heaven and Hell que je lui avais dit que je désirais lire, assuré que j'étais d'y trouver une révélation et une confirmation de certaines pensées qui s'agitent en moi depuis longtemps. La rencontre de Blake est pour moi de la plus grande importance. Déjà je l'avais entrevu, durant la première année de la guerre, dans un livre de Morceaux Choisis de la bibliothèque de Elisabeth Van Rysselberghe, rue Laugier, où j'habitais alors chez les Théo*. Comme un astronome suppute l'existence d'un astre dont il ne perçoit pas encore directement les rayons, je pressentais Blake, mais ne me doutais pas encore qu'il formait constellation avec Nietzsche, Browning et Dostoïevsky. La plus brillante étoile, peut-être, de ce groupe ; assurément la plus étrange et reculée." (A. Gide, Journal, 16 janvier 1922)

A la suite de cette lecture, Gide entreprend la traduction du livre de William Blake, Le Mariage du Ciel et de l'Enfer, qui paraîtra en 1923. En 1947, Gide soutient encore la rétrospective qui est consacrée à Blake par le British Council à la galerie Drouin, place Vendôme. Il dirige le comité français où l'on trouve aussi Picasso, Matisse, Breton, Léger, Malraux, Queneau ou Sartre. Quatre-vingts oeuvres sont alors exposées.

Depuis le 2 avril et jusqu'au 28 juin, le Petit Palais a rassemblé cent cinquante dessins, gravures, enluminures, livres et aquarelles prêtés par les musées britanniques, américains et des collectionneurs privés. Tout au long du hall Jacqueau les oeuvres de Blake sont regroupées autour des thèmes qui l'ont fasciné toute sa vie.

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* "Je continue la lecture de Blake avec étonnement. Commencé Tess of the d'Ubervilles, que j'ai déjà lu (mais pas bien), en français." (Journal, 25 août 1914)